Toumchouq, face et profilCharles Nouette
[Chine. Province du Xinjiang], Toumchouq [Tumushuke], face et profil
AP12571_(06)
Ancien numéro : 258-6854
Paris, musée du Quai Branly
Prise de vue entre le 9 novembre et le 14 décembre 1906
Négatif au gélatino-bromure d’argent sur plaque de verre
H. 18 ; L. 24 cm
Photographié également à Tumushuke, ce jeune homme porte le même manteau qu’en AP12571_(05) et l’on peut de face distinguer la chemise blanche sous l’épais manteau qui est ici bien serré à la taille par une large ceinture en tissu.
Le docteur Vaillant précise que l’habitude de se tenir assis jambes croisées fait que la plupart des habitants de ces régions ont le dos voûté. On pourra voir au fil des photographies réalisées sur chacun des sites où la mission a séjourné quelque temps qu’il y a plusieurs exceptions à cette constatation.
Quoi qu’il en soit, l’apparente uniformité de ces personnes, ainsi que le précise bien Louis Vaillant, n’est que d’apparence et, me permettrais-je d’ajouter, tient surtout aux conditions naturelles de cet environnement du Turkestan chinois et du Gansu nord, région immense, désertique, sauf dans les oasis et qui est fréquemment parcourue par des vents particulièrement violents, soulevant des monceaux de poussière qui obstruent la vue. Il convient aussi de rappeler que l’histoire n’a guère ménagé ces terres. Venus de Mongolie (Xiongnu, 匈奴, Ruan ruan/Ruru, 蠕蠕) ou du Gansu occidental (Yuezhi, 月氏), divers peuples nomades les ont traversées ou bien y ont fondé des royaumes, comme les Yuezhi puis les Turcs Tujue, 突厥 qui viennent de l’Altaï et remplacent les Ruru en Asie centrale au vie siècle, bientôt affaiblis par la Chine des Tang qui étend son protectorat sur la région au viie siècle mais le perd rapidement. Les Tujue reprendront leur place, laquelle leur sera ravie en 745 par les Ouïgours, Weiwuer, 維吾爾, des nomades mongols, turcophones et musulmans sunnites, tandis qu’un peu plus à l’est s’implantent les Kirghizes, Ke erkezi zu, 柯爾克孜族, originaires de Sibérie méridionale. On y trouvera aussi des manichéens, de même que des chrétiens nestoriens y compris pour ces derniers lors de l’établissement de l’Empire gengiskhanide. Une tolérance qui disparaîtra sous le règne de Tamerlan (1336-1405). Par la suite, Russes et Chinois s’imposeront, les premiers au Turkestan occidental, les seconds au Turkestan oriental annexé en 1759, perdu ensuite puis repris en 1884. Le bouddhisme s’y est frayé un chemin au cours du Ier millénaire, mais le Turkestan s’est par la suite lentement mais sûrement islamisé après la victoire des musulmans sur les Chinois en 751 à Talas au Kirghizistan. Cette bataille mit fin pour un long moment aux prétentions chinoises sur cette région, mais fut aussi le terminus post quem de l’expansion musulmane en Chine.
Étapes de publication :
Catherine Delacour, 15 mars 2023, rédaction de la notice pour première publication.
Pour citer cet article :
Catherine Delacour, « 258-6854 » dans Catalogue des photographies de la Mission Pelliot en Asie centrale (1906-1909), mis en ligne le 15 mars 2023. https://guimet-photo-pelliot.fr/notice/notice.php?id=277
© Réunion des musées nationaux – Grand Palais, 2023