Touen-Houang, grotte 67, autel du fond

Charles Nouette

Numéro actuel 203. Située à mi-hauteur, très près du grand Buddha mais sur le côté gauche, donc vers le sud. Elle est à droite de la grotte 61 (AP7940) et date des Sui ou bien du début des Tang. Le cliché permet de voir que l’on a un plafond en pyramide tronquée à décor de 1 000 buddhas et au moins la partie du mur nord, à droite, que celui-ci est également largement orné de ce même décor. La figure centrale, un grand Buddha, se présente debout de façon assez rigide, le bras droit le long du corps, main paume ouverte, tandis que le bras gauche est ramené devant la poitrine tenant un pan de la robe. Cette posture est celle de Śākyamuni (chin. Shijiamouni, 釋迦牟尼) prêchant au pic des Vautours, mais aussi, lorsque derrière lui est représenté en relief un massif montagneux accidenté, celle de l’image « miraculeuse » du Buddha de Fanhe, Fanhe Ruixiang, 番禾瑞像, dont l’apparition au mont Yugu, 御谷山, dans le comté de Fanhe, district de Wuwei, 涼州, au Gansu, eut lieu sous les Wei du Nord, prédite par l’éminent moine Liu Sahe, 劉薩何, qui vécut au v^e siècle. La légende est rapportée dans de nombreux ouvrages et en particulier dans les Biographies augmentées des moines éminents, Xu gaoseng zhuan, 續高僧轉, du moine Daoxuan, 道宣 (596-667), lequel s’est basé sur le texte perdu du moine Dao’an, 道安 (312-383). L’apparition de la statue dont parlait Liu Sahe se déroula effectivement en 519. Mais conformément à ce qu’il avait dit, la statue reste invariablement incomplète (sans tête) lors des troubles politiques ou de persécution du bouddhisme. En dépit de ces déboires (fin des Wei du Nord, persécution des Zhou du Nord), on lui avait élevé un temple dans la montagne. Or, avec l’avènement des Sui, tout change et en 609, l’empereur rend visite à ce temple et y vénère l’image sacrée qui est alors complète, ordonnant que l’on en fasse des copies et qu’on les diffuse sur le territoire. Le Buddha de cette grotte est certainement l’une de ces toutes premières « copies ». Il est entouré de deux bodhisattva et deux gardiens lishi, aux proportions réduites mais animés d’un sens du mouvement qui tranche avec la raideur archaïque du Buddha (pour évoquer sans doute la première apparition complète dans la montagne).